Avec l’extension de ses agréments à de nouvelles filières, Ecomaison doit relever un défi majeur : recycler des plastiques de nature et d’usage très variés. Pour structurer cette filière et maximiser l’incorporation de plastique recyclé dans les produits neufs, nous lançons un appel d’offres ambitieux. Décryptage avec Gwendal Michel, responsable R&D, et Romain Lecointre, acheteur.
Pourquoi le recyclage du plastique est-il devenu un enjeu si important pour Ecomaison ?
Romain Lecointre :
Parce que la donne a changé en 2022. Avant, nous n’avions qu’un seul agrément, celui de la filière des éléments d’ameublement. Le plastique représentait une faible partie des matières que nous collections, car il était uniquement issu des meubles de jardin. De plus, il était surtout relativement simple à trier et à traiter.
Nous sommes depuis agréés pour trois autres filières : les jouets et jeux (non électriques), les produits et matériaux du secteur de la construction du bâtiment, enfin les articles de bricolage et de jardinage. Ces objets sont de tailles, de formes, de couleurs, et surtout de résines plastique très diverses. Notre défi est de trouver des solutions techniques de tri et de recyclage pour chacun : nous nous y sommes engagés à travers nos agréments. C’est tout l’enjeu de l’appel d’offres que nous lançons.
L’enjeu n’est-il que technique ?
Gwendal Michel :
Il s’agit aussi de susciter l’intérêt des industriels pour le plastique recyclé en leur proposant des résines adaptées à leurs process de fabrication, tout en garantissant un coût net équivalent à celui des résines vierges. Cet enjeu prend encore plus d’importance depuis la baisse des prix des hydrocarbures en 2024, qui rend le plastique issu du pétrole plus attractif.
Le plastique recyclé doit donc devenir un choix naturel, car à la fois écologique et compétitif. Avec ces nouveaux agréments, nous sommes déjà passés de 5 000 tonnes collectées chaque année à plus de 10 000 tonnes prévues en 2025.
Ces résines peuvent être travaillées par les opérateurs de recyclage et les régénérateurs pour donner vie à de nouvelles formulations plastiques. C’est un vrai défi, dans un contexte complexe pour les entreprises françaises.

“Il s’agit aussi de susciter l’intérêt des industriels pour le plastique recyclé en leur proposant des résines adaptées à leurs process de fabrication, tout en garantissant un coût net équivalent à celui des résines vierges.”
Gwendal Michel


1. Tri des résines plastiques par infra-rouge sur résines broyées par couleur et par résine
2. Tri des résines plastiques par triboélectricité
3. Tri des résines plastiques par flottaison
4. Adaptation des procédés de plasturgie à la consommation des gisements Ecomaison

Pour les mousses- élastomères
1. Tri des mousses latex polyuréthane et latex
2. Préparation, recyclage et débouchés de réincorporation pour les mousses latex
3. Préparation, recyclage et débouchés de réincorporation pour les mousses polyuréthane

R. L. : Il est avant tout de trouver des opérateurs qui soient techniquement capables de trier et de préparer les plastiques pour faciliter leur réutilisation par les industriels et les metteurs sur le marché, adhérents Ecomaison, sur les chaînes de production.
Cerise sur le gâteau, nous cherchons également des partenaires en mesure de faire de la régénération, c’est-à-dire de produire des résines qui répondent aux cahiers des charges précis des industriels et qui leur permette de procéder à une substitution directe de la résine vierge par cette résine régénérée.
Nous souhaitons aussi travailler avec un maximum d’opérateurs, pour offrir un maillage dense sur tout le territoire français. Avec à la clé, moins d’impact CO2 et moins de coûts de transport. Le but de cette stratégie est de permettre à nos adhérents de sourcer à proximité des résines qui incorporent du recyclé Ecomaison, soit sous forme broyées, soit régénérées afin de créer les fondations d’une économie circulaire, source de création de valeur locale et d’ancrage territorial.
“Nous souhaitons aussi travailler avec un maximum d’opérateurs, pour offrir un maillage dense sur tout le territoire français.”
Romain Lecointre

Pourquoi est-il essentiel de miser sur l’innovation pour améliorer le tri et le recyclage des plastiques ?
Parce qu’aujourd’hui, la filière de recyclage des plastiques est peu structurée en France. Notre rôle est d’accompagner les opérateurs dans cette démarche. L’idée est d’encourager et de soutenir ceux qui adoptent des procédés innovants, et de les aider à choisir les procédés les plus performants.
Ecomaison identifie des technologies, les teste en direct avec ceux qui les fournissent, puis accompagne leur implantation sur les chaînes de tri existant en soutenant financièrement les investissements des opérateurs.
Nous aidons aussi à faire le lien avec les fabricants et distributeurs, pour qu’un maximum de plastique recyclé soit incorporé dans les produits neufs. Notre démarche est très proactive et nous cherchons à bien comprendre le besoin de nos adhérents afin de bien identifier les procédés de tri et de recyclage qui permettraient de produire une matière qui leur correspond. La compréhension du besoin final du plasturgiste est un paramètre clé de l’équation.
Au-delà de ce partenariat d’innovation, nous versons une prime d’incorporation de matière recyclée, pour aider à l’utilisation par nos fabricants adhérents de matières issues de la post-consommation, prime qui est proportionnelle à l’effort d’intégration de matière recyclée dans les produits.
Pouvez-vous nous donner un exemple de technologie que vous souhaitez voir émerger ?
G. M : Actuellement, nous en testons plusieurs : le tri optique par infrarouge nouvelle génération sur résine broyée qui permet de trier les résines pas typologie et par couleur ; la triboélectricité, qui consiste à séparer les résines entre elles sur la base de leur capacité d’électrisation ; et la flottation, qui permet de les différencier en fonction de leur densité.
En soutenant l’intégration et le développement à l’échelle industrielle de ces procédés sur les lignes de production des opérateurs, nous voulons accélérer la transition vers une économie circulaire concrète et performante. C’est à dire de la collecte des déchets plastiques, à leur tri, jusqu’à la production de résines formulées répondant aux besoins de nos adhérents. Et intégrant une part maximisée de nos flux Ecomaison.
La compréhension des besoins techniques de chacun des intermédiaires de cette chaine de recyclage et de production va nous permettre d’envisager de nouvelles consommations de résines produites localement ! Un vrai plus qui met en valeur le savoir-faire des métiers du recyclage et qui nous permet de minimiser l’empreinte carbone globale de ces résines.